De l'intolérance
L’intolérance doit être intolérée, elle doit
être l’unique exception dans le champ de nos tolérances. Il faut lutter de
toutes nos forces contre ce fléau qui a toujours guetté le moment propice à la
précipitation de la perte des sociétés humaines.
C’est précisément parce qu’elle ne peut pas
être combattue qu’il faut se ménager le pouvoir de l’ignorance. Il faut pouvoir
ne pas en parler, il faut pouvoir la laisser dans l’oubli, essayer de réagir
comme si cette idée était proprement inconcevable pour l’esprit humain, comme
si l’humain était nécessairement tolérant. Pensée résolument optimiste où
l’efficacité conserve moins d’importance que la conviction.
L’intolérance, c’est la violence de l’esprit.
Pire que l’ignorance, elle est la volonté de normalisation, l’envie de ne voir
que des constantes prédéfinies en l’être humain. C’est l’acculturation, le déni
de la différence, la peur de l’Autre, le règne du préjugé engendré par la
méconnaissance, voire l’absence de volonté de connaître. Comme si l’intelligence
avait besoin d’un minimum d’adversité pour étinceler, cette grotesque attitude
a toujours existé. J’ose, tout de même, vouloir que l’intolérance ne soit plus
érigée comme loi.