Sous un petit air de crise
L’analyse de l’origine d’une crise est
complexe. Je ne m’y risquerai pas. Je préfère rester sur le simple plan du
vocabulaire. On a entendu que le Fédéral tentait de rassurer le consommateur en
investissant sans compter (ou presque) l’argent public pour sauver les banques.
On a entendu parler de nationalisation, de recapitalisation, de remise en
confiance … Mais n’a-t-on jamais entendu quelqu’un s’appesantir sur le
citoyen ?
Le gouvernement a rassuré le consommateur, OK.
Mais qu’a-t-il fait pour le citoyen ? Il a trouvé, dans l’urgence, des
milliards d’euros … alors qu’il n’arrête pas de dire que les caisses de l’Etat
sont vides, que l’exercice du budget sera périlleux, que le refinancement des
Communautés est presqu’impossible, que les enveloppes resteront fermées pour
l’enseignement supérieur. N’est-il pas envisageable qu’on trouve quelques
petits millions d’euros, en urgence, pour ranimer notre enseignement ? Ne
peut-on pas croire que ce refinancement participera à la baisse du coût des
études, à la baisse du nombre de chômeurs peu qualifiés, à l’augmentation de
travailleurs, à la restauration de l’image de marque de la Belgique, à l’éducation
politique des citoyens, à la réinstauration de valeurs au sein d’un monde qui
les perd toutes ? N’est-il pas juste de penser que, ça aussi, c’est une
urgence ? Encore une fois, il s’agit de valeur politique : on préfère
défendre le pouvoir d’achat plutôt que le socioculturel, le consommateur plutôt
que le citoyen, la bourse plutôt que l’éducation !
Par ailleurs, à l’heure où la marchandisation
et le capitalisme outrancier sont devenus monnaies courantes, je m’étonne de
cette nationalisation soudaine. La bourse, cette jeune adolescente insolente,
est vite revenue vers les bons vieux états en criant à la mort. Le paternalisme
n’est pas éteint et la
Belgique a volé au secours de ces institutions au bord de la
faillite. Le Fédéral a voulu rassurer. Il se porte garant, dit-on … sauf qu’on
a entendu dire aussi qu’il ne disposerait pas d’assez de fond en cas de
faillite ! Qui peut-on encore croire ? Que peut-on encore
comprendre ? La main invisible cafouille et le monde en revient au
rassurant contrôle de l’Etat.
L’économie a volé la place au politique :
de la crise gouvernementale, on est passé à la crise boursière. Les acteurs
sont restés identiques puisque tout s’enchevêtre dans une globalisation non
contrôlée … et le citoyen ne sait plus sur quel pied danser : a-t-il
seulement son mot à dire dans cette démocratie trop compliquée ?